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Est-ce que l'amiante est un vice caché ?

La découverte d'amiante servant d'isolant dans les murs d'un immeuble ou de matériaux de construction est une surprise très désagréable. Lors de travaux de rénovation majeure ou de démolition les coûts nécessaires à son enlèvement sont prohibitifs et peuvent prendre le propriétaire par surprise.

Se pose alors la question:

Est-ce que la présence d'amiante dans un immeuble représente un vice-caché en droit québécois ?

La réponse n'est pas si évidente, puisqu'elle fut le sujet d'une cause en Cour Supérieure en 2005 dans Robitaille c La province canadienne des religieux de Saint-Vincent-de-Paul portée en appel en 2007.

Le demandeur réclame 518 208$ du vendeur pour les dommages résultant du coût d'enlèvement de l'amiante retrouvé dans l'immeuble. L'intention de l'acheteur était de transformer l'immeuble en hôtel, ce qui nécessitait entre autres de démolir certains murs, d'ajouter des planchers, refaire les escaliers, d'installer des ascenseurs et construire des chambres. Le projet fut mis sur la glace un moment mais quelques années plus tard une expertise fut entreprise dans le but d'évaluer la présence d'amiante. Tel que le mentionne le jugement;

«28 (...) il est utile de savoir que les travaux d’enlèvement d’amiante dépendent non seulement du pourcentage d'amiante retrouvé, mais également du type d'amiante. C'est au moyen de microscopie optique que la présence d'amiante peut être décelée. Ces tests permettent d'établir le type d'amiante présent et le pourcentage de la substance. Il existe cinq types d’amiante commercial.

29 L’amiante amphibole est plus toxique, dans une proportion de dix pour un, que l’amiante chrysotile. Ainsi, les travaux seront faits en tenant compte des risques d'exposition aux matériaux friables, risques que l'on qualifie de faibles, modérés ou élevés, dépendamment de la friabilité des matériaux.»

Il sera déterminé que le coût d'enlèvement de l'amiante s'élève à 483 208$. S'en suit un recours en garantie pour vice-caché ou le demandeur ne soulève pas un déficit d'usage sécuritaire ni que la présence d'amiante est illégale. Il est accepté des parties que l'amiante ne pose pas de problème si on n'y touche pas et s'il est enfoui dans les matériaux. Le problème était circonscrit à la démolition qui devient plus onéreuse.

Le juge conclut que «La présence d’amiante comme telle n’est pas un fait destructeur de l’usage. Il est admis que si l’on ne procède pas à des travaux de démolition, la présence d’amiante ne cause aucun déficit d’usage.»

Même si la démolition était prévisible considérant la désuétude de l'immeuble, le juge rajoute que;

«71 Il apparaît incongru d’établir que la démolition d’un immeuble constitue un usage. La démolition est justement le fait de ne pas vouloir faire usage du bien ou d’une partie du bien tel qu’il se trouve. Ce serait détourner la garantie conçue pour assurer à l’acheteur l’usage du bien acquis, que de considérer qu’il doit aussi garantir qu’une démolition ne coûtera pas plus cher que prévue. Cette garantie, qui aurait pu être donnée dans le contrat, ne s’y retrouve pas. (...)

74 Pour tous ces motifs, le Tribunal estime que la présence d’amiante dans l’immeuble acquis par la demanderesse ne constitue pas un vice caché au sens de l’article 1726 C.c.Q. La demanderesse ne peut fonder son action sur la garantie de qualité.»

En 2007 cette cause fut entendue en appel. Le juge Morissette conclut ceci:

«6. En l’espèce, vu la nature de la contrainte juridique susmentionnée, il revenait à l’appelante d’obtenir les assurances nécessaires de l’intimée, ou les garanties contractuelles appropriées, si elle souhaitait se prémunir contre une dépense imprévue. C’est ce qu’aurait fait un acheteur prudent et diligent. Or, les faits relatés dans le jugement entrepris démontrent que le comportement du représentant de l’appelante, au moment de l’offre d’achat du 10 septembre 1997, ne peut être qualifié de tel.»

Cet arrêt fut cité dans plus de 34 décisions principalement en Cour du Québec. Les décisions sont quasi unanimes quant au rejet du recours. Plusieurs furent intentés à la cour des petites créances ce qui explique la méconnaissance du droit par les demandeurs. Par contre, certains avocats de cabinets réputés se risquent encore à diriger leur client dans de tels recours espérant peut-être renverser ce courant jurisprudentiel. Voir le lien suivant:

http://www.canlii.org/fr/#search/sort=citationCount&origin1=%2Ffr%2Fqc%2Fqccs%2Fdoc%2F2005%2F2005canlii43250%2F2005canlii43250.html

Chaque situation est unique et mérite une analyse complète, mais il est important de se souvenir qu'un vice caché au sens de l'art 1726 se résume aux faits nuisant à l'usage physique du bien et non à sa démolition.

Patrick Lamanna ing et avocat 514-497-6177


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